
Charlie le Mindu par Jérôme Lobato
Le Mindu a du mordant
Inattendu, inclassable, poétique, délirant… le champ des qualificatifs destinés à esquisser une approche du travail de Charlie Le Mindu est aussi vaste que l’imagination du trentenaire. Une nouvelle preuve de sa folie créative via Charliewood, son dernier opus plus que capillaire, présenté au Palais de Tokyo.
Par Yamina Benaï
Poursuivant son odyssée dans la création contemporaine, alternant sa programmation entre figures affirmées et scène émergente, le Palais de Tokyo inscrit dans le paysage artistique contemporain une identité à nulle autre pareille. S’y côtoie une pluralité de voix, qui s’expriment via les expositions, bien sûr, mais aussi, les lectures-conférences, les spectacles… Art, design cinéma, vidéo, mode, danse sont ainsi passés au crible. Avec Charliewood se joue l’exploration des interstices entre création artistique reconnue comme telle et production créative par des personnalités hors des circuits classiques. Sujet passionnant qui, au printemps 2015, avait fait l’objet du “Bord des Mondes”, une exposition orchestrée par Rebecca Lamarche-Vadel, où le travail de Charlie Le Mindu figurait parmi les pièces présentées. Aujourd’hui, c’est un autre son que nous fait entendre celui qui déclare “je ne me considère pas comme un artiste, mais coiffuriste, pour reprendre l’expression de Philippe Decouflé”.
Donnant vie à ses “sculptures capillaires”, suivant sa propre terminologie, il franchit un pas en les mettant en scène dans un spectacle qui convoque son imaginaire sans bords ni bornes. Le genre de la revue est ici convoqué en flirt poussé avec les frontières de la mode, du spectacle vivant, de la vidéo et de l’installation. Entre scénographie de défilé, séquences chorégraphiées, tableaux surréalistes, Le Mindu coiffe ses figures vivantes, maquille visages et corps et les revêt de costumes avant de les inscrire dans des décors puisant dans la mythologie antique, les bestiaires fantastiques, coiffes médiévales et grands fonds marins.
A la manière d’un tableau dansé, la coiffe, prolongement spectaculaire d’identité, organise aussi le grand fracas du corps : il n’est plus que bouche, nez, moustache, oreille… Le corps inlassablement exploré expose un panel d’identités, propres à inciter le spectateur à interroger ses (in)certitudes. “Charlie Le Mindu incarne, selon moi, une sorte de Beetlejuice du Cabaret : il ausculte les mécanismes de la machinerie, les dissèque et pratique une réécriture spectaculaire et sombre, pour que fonctionne toujours le récit de la maison hantée”, souligne Vittoria Matarrese, co-commissaire.

Pourquoi Charliewood ? En référence à Dollywood, le parc d’attractions crée par Dolly Parton, chanteuse country à l’improbable plastique. Alors, face à un postulat au concept aussi personnel quel rôle tiennent les commissaires : “Vittoria Matarrese et moi entretenons une conversation depuis l’automne dernier avec Charlie Le Mindu. Parmi les nombreuses idées qui en ont émergé : scénariser une progression à la manière d’une descente vers Charliewood. Charliewood n’est pas qu’un spectacle, c’est un lieu avec un seuil. Charliewood commence par une allusion à la façade-bouche du cabaret L’Enfer, une institution du boulevard de Clichy, détruite dans les années 1950”, indique Julien Fronsacq. Hybridation des disciplines, croisement des genres, le spectacle comme promesse d’un “immense et raisonné dérèglement de tous les sens.”
INFOS PRATIQUES
Charliewood rassemble le nouveau spectacle éponyme de Charlie Le Mindu, ainsi que ses précédents spectacles Paris Hait Gris (2014-2015) et A Male Gaze (2015-2016). Le spectacle est donné devant un public debout, et dans la limite des places disponibles, réservation indispensable.
Dates des représentations :
En mars : les 17, 18, 19, 25, 26, 31 mars, à 20h30.
Programme de la soirée : Paris Hait Gris (2014-2015) ; A Male Gaze (2015-2016), entracte, puis Charliewood (création, 2016).
Tarifs à ces dates : 15 euros tarif plein, 12 euros tarif réduit (le billet comprend l’accès aux expositions en cours).
Préventes disponibles exclusivement sur Digitick ou à l’accueil du Palais de Tokyo.
Représentations dans le cadre du festival Do Disturb :
En avril : les 8 et 9, représentations uniques de Charliewood (création, 2016).
Conditions tarifaires et modalités de réservation du festival Do Disturb.
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